Transformer l'accueil de spectacles étrangers en étincelle qui réactive le secteur de la danse.
Après 2 ans de turbulence, la réouverture des frontières apparaît comme une bouffée d'air frais dans le paysage de la diffusion culturelle au Québec. La tentation est forte de reprendre les habitudes de mobilité antérieures, mais le contexte actuel a modifié les règles du jeu :
La pause pandémique a certes freiné le milieu artistique ici, mais - ailleurs dans le monde - les événements et tournées se sont tenus malgré tout, déliant certains liens pourtant serrés qui unissaient autrefois les artistes québécois et l'international.
Pendant ce temps, la popularité grandissante des Netflix et autres Disney+ a donné une soif d'œuvres internationales au public confiné.
De leur côté, les diffuseurs font des efforts surhumains pour attirer à nouveau ce même public dans leurs salles, tiraillés entre cette demande d'œuvres à grand déploiement, le poids financier pour faire venir de telles propositions en ville comme en région et l'inflation qui diminue le pouvoir d'achat des spectateurs.
À cela s'ajoute l'urgence climatique qui demande de revoir les manières de déplacer les projets artistiques d'une ville à l'autre en minimisant l'impact sur l'environnement.
La conjugaison de tous ces facteurs crée une complexité sans précédent pour tous les acteurs du secteur de la danse. Le défi est de taille, mais il peut être relevé en revenant à ce qui anime le cœur de notre pratique : créer la rencontre. Les arts de la scène aspirent à effacer les frontières physiques et mentales, et le talent d'ici s'est souvent illustré outremer pour cette capacité à rejoindre l'autre. Prisé aux rendez-vous professionnels et aux festivals internationaux, le Québec est un gage d'excellence qui s'exportait à profusion avant la pandémie. Aujourd'hui, c'est peut-être par l'importation que la province peut reprendre pied dans la mobilité internationale et solutionner le casse-tête de la diffusion des années post-covid.
En mobilisant le milieu pour accueillir davantage de talents internationaux, les réponses à certains enjeux s'illuminent :
Satisfaction du souhait du public de découvrir des œuvres reconnues mondialement, et ce, à peu de frais et d'efforts;
Rencontre entre les artistes d'ici et les innovations d'ailleurs pour nourrir la créativité des chorégraphes et des interprètes;
Répartition des coûts de tournée, permettant aux diffuseurs autant en métropole qu'en région d'accueillir des propositions internationales;
Implantation d'un réseau de tournée où la mobilité est maximisée pour réduire l'impact environnemental du secteur.
Mais, surtout, cette circulation durable resserre les liens avec l'étranger, facilitant le dialogue qui permet à nos artistes de se produire aux quatre coins du monde.
Plusieurs laboratoires ont été menés pour mettre à l'épreuve les avantages de cette réciprocité internationale. Pensons notamment au spectacle Le problème avec le rose, cocréation jeune public entre la compagnie québécoise Le Petit théâtre de Sherbrooke et la compagnie française La [parenthèse] / Christophe Garcia. Avec une distribution qui comprend des artistes des deux pays, l'approche des diffuseurs sur les deux territoires a été facilitée. En résulte une tournée 2022-2023 comprenant plus de 90 dates sur 2 continents à travers une tournée optimisée autant au niveau du rayonnement qu'au niveau écologique.
En s'associant à la compagnie yvann alexandre, CAPAS • Label de danse a pu développer une des rares tournées d'envergure pour une compagnie de danse contemporaine internationale au Québec. Avec 8 représentations dans 7 villes entre Sherbrooke et Gaspé, Se méfier des eaux qui dorment pourra prendre son envol en s'appuyant sur l'initiative Archipel qui regroupe des acteurs culturels qui facilitent la circulation d'œuvres entre le Canada, la France et la Tunisie. En plus de répandre l'excellence française sur le territoire, cette collaboration vient resserrer les liens avec le Théâtre Francine Vasse à Nantes - géré par la compagnie yvann alexandre - qui diffuse l'art québécois depuis plusieurs années. Ainsi, la présentation de spectacles internationaux sert oui à faire découvrir l'ingéniosité internationale aux publics d'ici, mais elle agit surtout dans l'intérêt d'une relance culturelle où la bilatéralité des échanges devient un moteur d'innovation.
CAPAS a également offert un service de production de tournée a une initiative collective de diffuseurs pluridisciplinaires membres de La danse sur les routes du Québec pour accompagner les diffuseurs québécois dans l'accueil d'une compagnie de danse hollandaise à l'automne 2023. Ce projet a donné lieu à une mutualisation des ressources entre une dizaine de diffuseurs de région impliqués dans cette tournée. En travaillant en commun, ces salles se sont ainsi offert la possibilité d'accueillir un groupe de renommée internationale à frais amoindris. Une telle initiative outille à la fois notre équipe et ces diffuseurs solidaires pour fortifier le marché à long terme.
En défendant autant les intérêts d'artistes d'ici et de l'international, CAPAS devient lui-même un carrefour de rencontre, un pont entre le Québec et l'international, autant pour permettre aux artistes d'ici de rayonner à l'extérieur du pays que pour faciliter l'arrimage des ambitions entre les diffuseurs d'ici et les propositions d'ailleurs. Ce modèle axé sur l'entraide ne demande qu'à faire boule de neige pour redéfinir nos chaînes d'approvisionnement et les transformer en stimulants terrains de jeu où les frontières s'amenuisent pour rendre la diffusion plus organique, plus humaine.
CAPAS • Label de danse remercie le Conseil des arts et des lettres du Québec, le Conseil des arts du Canada et le Conseil des arts de Montréal pour le soutien de nos missions internationales.